Monsieur le Maire,
Les salariés de Regaz et Gaz de Bordeaux étaient une large majorité en grève le 17 novembre. D’abord en réponse à une journée nationale d’action portant sur les salaires. Mais aussi contre l’externalisation de certaines missions en faveur du privé, contre des erreurs de gestion coûteuses, contre une politique de course à la rentabilité financière se traduisant par une obsession à reverser des dividendes aux actionnaires privés, plutôt que de chercher des réponses sociales en terme de tarifs et d’emplois statutaires.
L’émotion autour de l’avenir de Gaz de Bordeaux ne vient pas d’une lubie de quelques dirigeants syndicaux.La libéralisation du marché de l’énergie au plan européen (d’ailleurs votée par les principales formations politiques représentées ici), puis la séparation juridique des fonctions de distribution et de commercialisation du gaz (frappant toutes les entreprises locales de distribution -ELD- de plus de 100 000 abonnés), l’entrée dans le capital de groupes comme ENI ou Dalkia, ont conduit Gaz de Bordeaux à mener progressivement une politique d’entreprise calquée sur le privé:
– blocage de la masse salariale
– augmentations tarifaires
– recherche de rentabilité immédiate…
Au moment où le débat national sur l’avenir énergétique de notre pays part dans tous les sens, notamment quant à la place du nucléaire, il nous semble important de mesurer combien la distibution et la vente du gaz forment un enjeu:
– d’indépendance nationale et de maîtrise locale,
– de justice sociale par une politique tarifaire adaptée, bien qu’encadrée par la Commission de régulation de l’énergie,
– de diversification protectrice de l’environnement: Regaz a développé des investissements intéressants pour la géothermie, le photovoltaîque, le Gaz Naturel pour Véhicule…
Les 220 000 abonnés girondins ont droit à un seervice public les protégeant des appétits des marchés financiers, dont l’actualité montre que leur voracité ne s’arrêtent pas qu’aux portes des banques mais pénètre aujourd’hui au coeur des politiques des Etats.
Les 400 salariés ont droit à poursuivre leurs efforts dans ce qui a fait la force de cette entreprise depuis 1919:
leur connaissance du territoire, leur savoir-faire, leur dévouement au service public (comme en a témoigné leur mobilisation lors de la panne de mai dernier au sud de la CUB).
Les citoyens bordelais ont droit à la garantie que la participation majoritaire de la ville dans le capital de Regaz va contribuer à préserver l’entreprise de logiques qui, ailleurs, provoquent sang et larmes avant d’échouer.
La ville de Bordeaux doit garder ce giron industriel et commercial gazier, deuxième du pays après Gaz de France. Pas seulement pour les 3 millions d’euros de redevance annuelle en faveur du budget municipal (dont on pourrait d’ailleurs interroger une nouvelle logique de redistribution sociale en direction des usagers).Mais pour cette image de réussite que certains ont l’ambition de transformer en royalties sur les marchés libérés !
Aussi, nous vous demandons, monsieur le Maire:
-1- un démenti par un écrit aux personnels de tout projet de vente de parts de Gaz de Bx au groupe Total (dont on est sûr de l’absence totale de philantropie quand on connait ses stratégies d’échappement à l’impôt)
-2-d’étudier la possibilité du retour du groupe Gaz de Bx – Regaz sous statut de Régie municipale. Il ne s’agit pas ainsi de faire plaisir à mon groupe politique qui, en 1991, fut le seul à s’opposer à la transformation de la Régie en Société d’économie mixte, mais bien de considérer que l’énergie, comme l’eau, la santé, l’éducation ou la culture, n’est pas une marchandise. Et que de nombreuses collectivités se posent aujourd’hui la question de gérer en Régie directe l’eau ou les transports publics,